Portrait de patiente : Valérie Hay

J’ai la chance d’être une Patiente Accompagnatrice en cardiologie. Plus particulièrement dans le contexte de la transition des soins et services de santé pédiatrique de Sainte-Justine vers ceux prodigués aux adultes à l’Institut de Cardiologie de Montréal.

La cardiologie est mon secteur de prédilection étant donné que je suis née avec une atrésie tricuspidienne, qui est une malformation cardiaque congénitale plutôt rare (5 sur 100000 naissances). Cette malformation du cœur implique que le ventricule droit est sous-développé et, par conséquent, moins de sang circule vers les poumons. C’est à l’âge de 2 mois que ma première intervention chirurgicale est effectuée avec succès, puis à 2 ans et finalement à 11 ans la procédure de Fontan a été réalisée afin d’éviter le ventricule atrophié et diriger tout le sang vers les poumons pour une oxygénation optimale.  Le cœur gauche pompe donc tout le sang du corps afin qu’il soit oxygéné; j’ai une pompe à un temps. Et, finalement, un pacemakera été implanté pour s’assurer que le cœur batte suffisamment pour les besoins d’une jeune fille de 17 ans allant au Cégep.

Malgré une santé qui semble précaire, je vis une vie plutôt active où je marche, je travaille, et je fais mon épicerie, mais j’ai moins d’endurance que mes amis. Malgré mes limites, j’ai toujours un projet en tête! J’ai donc réussi à me construire une vie qui me plait, même si j’ai dû surmonter certains obstacles, comme des réactions négatives de certaines personnes face à mon état de santé ou des deuils comme la maternité. Plus jeune, il m’arrivait de me sentir exclue à cause du regard de certaines personnes et certains commentaires. Au fil des années, j’ai appris à accepter mes limites et compris que tout le monde a ses propres limites. Je suis fière d’oser dire que j’ai su battre quelques pronostics, étant donné que j’ai été capable de faire des études supérieures, je vis seule, j’ai un emploi à temps plein, j’ai voyagé et je suis retournée aux études. Je suis maintenant à compléter une maîtrise en informatique.

Ma malformation n’est pas très connue chez les médecins pour les adultes, je fais partie des plus « vieilles patientes » au Québec, car généralement les enfants ne survivaient pas à cette malformation congénitale. Lorsque j’étais suivie à Sainte-Justine, j’avais une cardiologue plutôt autoritaire qui m’a suivie jusqu’à ma transition. J’étais une enfant plutôt mature pour mon âge et j’ai été poussée à développer mon autonomie très tôt, ce qui a fait que j’ai pris ma santé en charge à un jeune âge. Conséquemment, la relation de dépendance parent-enfant s’est transformée en relation de confiance très tôt. Le passage à l’Institut de Cardiologie de Montréal s’est donc réalisé par nécessité et naturellement; mon boîtier de pacemakerdevait être changé et j’étais trop vieille pour Sainte-Justine, donc c’est à l’Institut de Cardiologie de Montréal qu’a été réalisée la chirurgie! J’ai toujours été très bien traitée par toute l’équipe. Malgré mon parcours pas très conventionnel, j’aurais aimé avoir quelqu’un qui essaie de me comprendre et qui m’aurait aidée à naviguer au travers de toutes les épreuves. Plus jeune, j’étais un peu nerveuse, car je me sentais dépassée par la situation et obligée de faire le lien entre les différents services de soins de santé afin d’avoir le même type de soins que du côté pédiatrique, alors que dans les faits, tous les spécialistes se parlent. Avoir eu quelqu’un à mes côtés aurait probablement diminué mon stress quant aux changements de procédures et des différentes façons de fonctionner entre les soins pédiatriques et adultes.

Cette différence de procédure a créé un certain stress et inconfort, que j’ai appris à gérer et qui a poussé mon implication comme Patiente Accompagnatrice. J’ai cherché un groupe spécifique aux congénitaux cardiaques, afin de rencontrer des gens qui avaient des expériences similaires aux miennes, mais il en existe uniquement aux États-Unis. Au Québec, il existe EnCoeur, qui est un groupe de soutien pour les parents d’enfant cardiaque, mais aucun groupe canadien n’est dédié aux patients cardiaques congénitaux. C’est pour cette raison que je suis ravie d’apporter ma contribution, mon expérience de vie et mes connaissances au projet de transition en cardiologie.

J’ai eu la chance de rencontrer une première patiente et sa mère. La jeune patiente sera transférée vers les services de l’Institut de Cardiologie de Montréal et il m’a fait plaisir de leur faire faire le tour des services que je connais. De par mon interaction, je sens que les parents et les patients ne vivent pas la transition de manière identique. J’ai senti l’inquiétude des parents et j’espère pouvoir la diminuer en étant présente pour leur enfant-patient et en leur expliquant comment naviguer dans les soins de santé pour adulte. Pour les patients, je crois que les Patients Accompagnateurs sont une excellente ressource, car nous avons une idée de ce que le jeune peut vivre et des différentes interrogations qu’il peut avoir. Un lien de confiance entre deux patients peut être plus facile à établir de par l’élément commun qui est la cardiopathie.

Finalement, je me considère excessivement chanceuse d’avoir la santé et l’occasion de m’impliquer dans ce superbe projet et combler un besoin par ce nouveau rôle de Patiente Accompagnatrice!

Ce contenu a été mis à jour le 10 avril 2019 à 10 h 05 min.

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