Un article de Gabriel Marcotte, intervenant psychosocial à Entraide Grands Brûlés, intervenant à l’accessibilité à Suicide Action Montréal et étudiant à la maîtrise en psychopédagogie
Un projet de recherche mobilisant les efforts conjoints d’un étudiant à la maîtrise en psychopédagogie de l’Université de Montréal, d’un organisme sans but lucratif et du CHUM, avec l’apport de patients ressources accompagnateurs et l’usage de la plateforme Facebook, est actuellement en cours. En effet, le partenariat entre Entraide Grands Brûlés, l’unité des grands brûlés du CHUM et de la Direction collaboration partenariat patient permet la mise en place d’un programme de soutien par les pairs dont l’impact sur l’engagement dans le traitement en réadaptation sera étudié.
Les brûlures graves et leurs impacts
Au Québec, une personne par jour en moyenne subit des brûlures graves. Pour l’entièreté de l’ouest de la province, les survivants de brûlures seront traités par le centre d’expertise situé à Montréal qui est composé du CHUM, de l’Hôpital de réadaptation Villa Medica et d’Entraide Grands Brûlés.
Le processus de guérison suivant les brûlures est long et ardu. Non seulement les individus traversant cette épreuve doivent vivre avec les douleurs et prendre le temps nécessaire pour guérir, mais ils doivent aussi souvent réapprendre à faire des gestes qu’ils faisaient au quotidien, comme marcher ou manger (Kornhaber, Wilson, Abu-Qamar et McLean, 2014a). À ceci s’ajoute le besoin de s’approprier à nouveau son corps, ce qui peut s’avérer un processus ardu, selon l’individu en question et les régions atteintes (Kornhaber, Wilson, Abu-Qamar et McLean, 2014b). La première année après l’hospitalisation est d’ailleurs une période particulièrement difficile pour les victimes de brûlures graves (Dahl, Wickman, Björnhagen, Friberg et Wengström, 2016).
L’apport des patients ressource accompagnateurs
L’ensemble de la recherche s’appuie sur l’approche patient partenaire ou, plus exactement, de l’intervention de patients ressources accompagnateurs (PRA). Ce type d’intervention est issu du concept de patient partenaire qui tire lui-même son origine dans l’idée d’impliquer à tous les niveaux du système de santé, les patients qui en font usage (Pomey, Flora, et al., 2015). Le patient ressource est une forme de partenariat patient où, entre autres, des personnes ayant préalablement vécu une problématique de santé désirent offrir du soutien à une personne qui fait face au même épisode.
Une recherche précédente faisant usage des PRA a été effectuée récemment. Les patients ressources ont été intégrés auprès d’une clientèle ayant subi des amputations traumatiques au sein du Centre d’expertise en réimplantation ou revascularisation microchirurgicale d’urgence (CEVARMU) (Pomey, Vigneault, et al., 2015; Vigneault et al., 2015). Cette recherche démontre notamment que le soutien apporté par les PRA aide à briser l’isolement, à améliorer le moral, en plus de redonner de l’espoir quant au parcours médical à venir.
Dans le cadre de cette recherche, l’intégration de patients ressources accompagnateurs auprès des grands brûlés et leur impact sur l’engagement dans la réadaptation sera mesuré.
Le lien avec les réseaux sociaux
L’interaction entre les problématiques de deuil, d’image de soi et d’engagement en plus des notions d’espoir et de trouble de stress post-traumatique (TSPT) semble indiquer le grand potentiel d’une intervention globale touchant à chacune de ces problématiques. Une intervention par les pairs en est un bon exemple. Une avenue novatrice et intéressante pour cette problématique précise concerne l’utilisation de technologies de communication et de l’information (TIC) et plus particulièrement celle des réseaux sociaux, ressource connue et utilisée par la population visée.
Les médias sociaux sont déjà utilisés par des patients pour approfondir leurs savoirs, améliorer la communication patient-médecin, avoir accès à un soutien par les pairs, pour l’échange de conseils et les soins personnels (2013). Bien que Twitter soit le plus utilisé selon cette étude (59% versus 52% pour Facebook), un plus grand nombre d’utilisateurs sur Facebook (près d’un milliard en 2012) rend cette option davantage intéressante puisque plus accessible. Par rapport aux survivants de brûlures, leur utilisation des médias sociaux a également été regroupée sous cinq thèmes centraux, soit l’identité, la connectivité, le soutien social, trouver un sens et l’intimité (Giordano, 2014).
En diversifiant l’offre de soutien d’un PRA par l’usage de Facebook, il sera possible d’élargir le champ d’action de ces aidants naturels et de rendre disponible un soutien lors d’une période parfois plus difficile qu’escomptée, soit le retour à la maison.
Le projet de recherche
La première étape est franchie pour la mise en place du projet, soit la formation, l’intégration et la supervision de patients ressources accompagnateurs (PRA) au sein de l’unité des grands brûlés du CHUM. Il ne reste plus qu’à offrir ce soutien par l’entremise du réseau social Facebook, où un compte sera associé à l’ensemble des PRA et où des rencontres par le biais de Facetime ou Messenger seront possibles, afin de rendre disponible ce soutien à l’ensemble des victimes de brûlures graves lorsqu’elles ne sont plus au centre d’expertise.
Références
Antheunis, M. L., Tates, K. et Nieboer, T. E. (2013). Patients’ and health professionals’ use of social media in health care: Motives, barriers and expectations. Patient Education and Counseling, 92(3), 426-431. doi: http://dx.doi.org/10.1016/j.pec.2013.06.020
Dahl, O., Wickman, M., Björnhagen, V., Friberg, M. et Wengström, Y. (2016). Early assessment and identification of posttraumatic stress disorder, satisfaction with appearance and coping in patients with burns. Burns, 42(8), 1678-1685. doi: https://doi.org/10.1016/j.burns.2016.09.012
Giordano, M. S. (2014). The Lived Experience of Young Adult Burn Survivors’ Use of Social Media.(City University of New York, CUNY Academic Works.). Repéré à http://academicworks.cuny.edu/gc_etds/216
Kornhaber, R., Wilson, A., Abu-Qamar, M. Z. et McLean, L. (2014a). Adult burn survivors’ personal experiences of rehabilitation: An integrative review. Burns, 40(1), 17-29. doi: http://dx.doi.org/10.1016/j.burns.2013.08.003
Kornhaber, R., Wilson, A., Abu-Qamar, M. Z. et McLean, L. (2014b). Coming to terms with it all: adult burn survivors’ ‘lived experience’ of acknowledgement and acceptance during rehabilitation. Burns, 40(4), 589-597. doi: 10.1016/j.burns.2013.08.038
Pomey, M.-P., Flora, L., Karazivan, P., Dumez, V., Lebel, P., Vanier, M.-C., Jouet, E. (2015). Le « Montreal model » : enjeux du partenariat relationnel entre patients et professionnels de la santé.Santé Publique, S1(HS), 41-50. doi: 10.3917/spub.150.0041
Pomey, M., Vigneault, K., Arsenault, J., Higgins, J., Lahaie, V. et Fortin, O. (2015). Le patient-ressource chez les victimes d’amputation traumatique. La Revue du Praticien, 65, 1215.
Vigneault, K., Higgins, J., Pomey, M.-P., Arsenault, J., Lahaie, V., Mercier, A.-M., Danino, A. M. (2015). Bringing patient advisors to the bedside – a promising avenue for improving partnership between patients and their care team. Patient Experience Journal, 2(2), 16-22.
Ce contenu a été mis à jour le 25 février 2019 à 9 h 53 min.
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