Portrait de patient : Nicolas Steresco

Par Nicolas Steresco

 

Le 15 avril 1998 fut une journée déterminante dans ma vie. Étant un jeune de 25 ans très téméraire, j’ai eu un grave accident de moto.

Il en résulta une fracture ouverte avec éclatement de mon tibia et péroné gauche, un sérieux risque d’amputation à cause, entre autres, d’un manque de circulation sanguine, 7 opérations de reconstruction : orthopédique, vasculaire, plastique ( greffe de peau ) pour sauver ma jambe, transfusion sanguine (2 litres), un TCC ( traumatisme crânio-cérébral ) très sévère. Jai été dans un coma profond pendant 6 semaines au soins intensifs et 2 tests sur l’échelle de coma Glascow ont mis en évidence des résultats assez catastrophiqus : 5/15 le premier et 3/15 le second, ce dernier ayant été fait à la suite d’une hémorragie cérébrale qui a nécessité l’implantation par craniotomie d’une soupape pour réduire la pression intracrânienne.

Cet accident m’a conduit à passer 4 mois à l’hôpital. Je n’ai aucun souvenir de mon séjour, car mon coma profond a été suivi de 5 mois de coma léger, conjugué à une amnésie post-traumatique.
Suite à mon séjour à l’hôpital, j’ai fait de la réadaptation dans deux centres différents pour tout réapprendre pendant deux ans et demi. Cest ainsi que jai du m’adapter à ma « nouvelle » mobilité, bien réussir à gérer ma fatigue, développer et bien utiliser des « outils compensatoires » pour mes séquelles cognitives de mémoire, de concentration et de résolutions de problèmes, etc.

Aujourd’hui, mon tibia gauche est encloué d’une tige de titane et ma jambe gauche est plus courte de 1cm.

 

Je vais partager ici quatre expériences qui illustrent l’importance du partenariat de soins clinique.

Pour moi, ces exemples sont révélateurs de ce que je suis « re-devenu » après un travail en partenariat entre les professionnels de la santé AVEC nous , mes parents et moi-même.

 

Première expérience

Suite à mon accident et les complications à ma jambe gauche, le chirurgien orthopédiste envisageait très fortement l’amputation. Mes parents se sont opposés à cette éventualité et ont demandé des explications claires et précises à toute l’équipe chirurgicale. Les médecins leur ont expliqué qu’avec une amputation, il y aurait beaucoup moins de chirurgies et une hospitalisation moins longue. Ils leur ont dit que toutes ces chirurgies compliquées et spécialisées n’étaient pas une garantie absolue de guérison. Ils avançaient aussi que je pourrais commencer ma réadaptation plus vite. J’étais encore dans le coma à ce moment-là et personne ne savait quand et dans quel état je me réveillerais, si je me réveillais …

L’équipe médicale a été à l’écoute de mes parents qui ont réaffirmé leur réticence à l’amputation et ont demandé de faire tout ce qui est médicalement possible pour sauver ma jambe gauche. Mes parents se sont engagés à prendre soin de moi dans toutes situations, peu importe le temps nécessaire à mon rétablissement. Finalement, les chirurgiens ont « redonné vie » à ma jambe gauche et il s’est avéré que cette jambe « ressuscitée » est devenue ma meilleure jambe, car elle n’a aucune séquelle neurologique, contrairement à ma jambe droite qui « traine de la patte » maintenant avec ses troubles neurologiques !!!

Sans les demandes d’explications de mes parents et leur engagement, la volonté et la disponibilité des médecins, je serais amputé d’une jambe aujourd’hui et cela aurait été une grave erreur.

 

Deuxième expérience

Alors que j’étais en coma léger ( réveillé, mais aucun souvenir ) et que j’avais la jambe gauche plâtrée, j’ai commencé à faire de la physiothérapie. Comme j’étais amorphe et non disposé à bouger et afin d’adapter mon programme à qui j’étais afin de me motiver, mon physiothérapeute a demandé à mes parents qui j’étais et ce que j’aimais avant l’accident. Fort de ces informations, il a inventé un jeu de hockey sur table ( j’étais hockeyeur performant avant accident ) qui m’a motivé, m’a fait bouger et ma permis de travailler avec succès ma mobilité et posture malgré mon état du début !

Cet évènement démontre bien que lorsqu’on adapte les interventions à la personne, les chances de succès sont grandement augmentées.

 

Troisième expérience

J’avais énormément de difficulté à bien dormir lors de ma réadaptation. Il était donc primordial qu’on me laisse dormir le plus longtemps possible le matin. C’était pour moi la seule façon d’aller chercher assez d’énergie pour mes divers ateliers de réadaptation. Par contre, cette situation faisait que je me réveillais en ayant souillé ma couche.

Un matin, la cheffe préposée aux bénéficiaires et moi avons eu une confrontation au sujet de mon problème d’incontinence. Cette dernière « m’avait menacé » de me réveiller les matins suivants une heure à l’avance pour qu’ils me mettent aux toilettes pour que je ne fasse jamais plus dans ma couche et qu’elle ait besoin de me changer!

Lors de mon entrée au gym ce matin-là, mon physiothérapeute constate que je suis très perturbé et m’en demande la raison. Je lui explique ce qu’il vient de se passer. Il est monté voir à l’étage cette préposée pour faire le point avec elle. Mes parents ont aussi discuté de cette situation avec l’administration de mon étage d’hébergement et plus jamais, par la suite, je n’ai eu à faire avec cette préposée. Mon incontinence s’est atténuée assez rapidement, sans stress, avec mes traitements et stratégies d’ergothérapie.

Si personne n’était intervenu comme l’a fait mon physiothérapeute et mes parents, j’aurais continué à vivre un grand stress et ma réadaptation en aurait été affectée.

 

Quatrième expérience

En phase 3 de ma réadaptation, j’ai développé une incompatibilité avec ma physiothérapeute qui était sur le bord de la retraite et de la « vieille école ». Je mettais énormément d’emphase sur mon désir de remarcher le mieux possible et, de plus, je voulais m’entraîner dans le gymnase de l’institution. Elle me répétait que cela ne servait à rien et que je ne remarcherais probablement plus de façon fonctionnelle. Rien pour m’encourager! Devant cette situation et le peu de progrès que je faisais, mes parents m’ont aidé et nous avons fait une démarche pour changer d’intervenante.  Nous avons eu la chance d’être entendus et c’est alors qu’une kinésiologue possédant une maîtrise en neuro-mobilité que j’avais rencontrée dans le gymnase, m’a pris sous son aile. Et avec elle, j’ai fait des progrès immenses en marche et mobilité.

Grâce au partenariat établi entre mes parents, l’administration et moi-même nous avons pu trouver une solution et le fait de pouvoir bénéficier d’une personne qui s’adapte et croit en moi m’a beaucoup motivé et m’a permis de faire des progrès significatifs. 

Je vous remercie de m’avoir lu, je crois, que mon expérience donne de bons exemples personnels de partenariat de soin et de services.

Ce contenu a été mis à jour le 14 janvier 2019 à 14 h 26 min.

Commentaires

2 commentaires pour “Portrait de patient : Nicolas Steresco”

Jean-Pierre Robitaille

28 avril 2021 à 10 h 26 min

Bonjour, j’ai moi même été a de multiples reprises opérés au genou et à la jambe gauche. Je suis resté avec des douleurs chronique. Je recherche un médecin spécialisé afin d’obtenir un nouvel avis professionnel. J’apprécierais connaître le spécialiste qui vous a opéré et les thérapeutes qui ont fiaient le suivi postopératoire. Suite aux opérations, j’ai présentement une prothèse de genou qui me fait grandement souffrir. Merci beaucoup de bien vouloir m’informer.

XMC.pl

24 juin 2022 à 12 h 46 min

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